Avec Henri de Castries, PDG du groupe Axa, sur le thème « Révolution numérique, risque climat et normes financières: la stratégie d’AXA », jeudi 7 janvier à 8H30

Publié le 18 décembre 2015

Procope, 13 rue de l’Ancienne Comédie 75006 Paris

. On ne peut plus compter sur la Chine pour tirer la croissance mondiale

. Le Cyber risque, priorité numéro Un de tout conseil d’administration

. Compte tenu du niveau du pétrole, des taux et de l’euro, la France devrait connaitre une croissance deux fois plus élevée.

En dépit d’une atmosphère anxiogène, en France et en Europe, un an jour pour jour après les attentats contre « Charlie Hebdo », Henri de Castries n’est « pas pessimiste ». Même s’il « faut s’attendre à un monde infiniment plus volatil ». C’est vrai sur le front financier. Le PDG du Groupe Axa, pour qui la crise de 2008 est venue d’un effet de levier et de l’«absence de vigilance des régulateurs et des superviseurs » (« beaucoup de banquiers ont perdu leur job. Beaucoup moins de banquiers centraux), s’inquiète des excès de la régulation qui, depuis lors, a voulu « uniformiser les règles et obliger tout le monde à avoir le même horizon» alors que les assureurs, par exemple ont un horion à 15 ans.

Autre source de volatilité. Sur ce terrain, le PDG d’Axa s’étonne …que certains s’étonnent. Le changement de modèle de croissance chinois ne peut pas se faire en six mois. Et si « la lutte contre la corruption a probablement ralentit la croissance, car elle tétanise un certain nombre d’acteurs qui prennent moins de risques, la croissance est plus saine ». Reste une certitude : « on ne peut plus compter sur la Chine pour tirer la croissance mondiale ».

Il n’empêche. Pour les entrepreneurs « qui ont une vision, un sens de l’ambition et des solutions à apporter », un monde volatil est, pour Henri de Castries, « une extraordinaire nouvelle ». Pour un groupe dont l’ADN « c’est d’aimer la compétition et la bagarre », la bonne réponse face aux nouveaux concurrents nés de la montée en puissance du numérique et au danger d’ « ubérisation », c’est l’agilité. Axa passe des alliances en matière de technologie et de talents en ayant conscience que « les alliés du matin peuvent être des compétiteurs, le soir ».

Sans oublier que le « big data » est essentiel pour l’assurance et permet de réduire la part de l’inconnu pour se rapprocher du cœur de son activité, la gestion de l’aléa et la prévention du risque. De quoi mieux en évaluer le prix. Le « big data » est aussi intimement lié à l’ »open data », autrement dit aux données détenues par les services publics et, en particulier, à la sécurité sociale. Alors que notre système de protection sociale est, pour le PDG d’Axa, « insoutenable » car il coûte trop cher, il existe des gisements d’économies « himalayens » à réaliser en utilisant les données de la sécurité sociale pour développer des solutions d’analyse et de prévention, «bien plus efficaces qu’un énième plan d’économies portant sur la taille des enveloppes…. »

Si le numérique offre de formidables opportunités, il comporte aussi de vrais risques, notamment terroristes et criminels. « Le danger est partout » reconnait Henri de Castries. « Le plus préoccupant est le cyber risque » qui peut frapper dans différents domaines : les systèmes de paiement, la distribution de l’électricité, de l’eau, le vol voire la destruction de données des entreprises, par des cyber-attaques. Ce devrait être la priorité numéro 1 des conseils d’administration. Le Groupe Axa est d’ailleurs « attaqué tous les jours ! ». Mais domine encore trop souvent « le syndrome Maginot » : on dépense trop pour se protéger contre les risques de la dernière guerre et pas contre celle à venir.

Interrogé sur la montée des populismes et du nombre des déçus de la construction européenne, Henri de Castries stigmatise ceux qui, au Sommet de Nice, en décembre 2000, ont décidé d’élargir à nouveau l’Union sans l’approfondir, alors que l’Europe était sur de bons rails. Les gouvernements d’alors se sont réfugiés, par la suite, dans une « vision tactique et utilitariste» de l’Union. Pour lui, « David Cameron n’en est qu’une illustration supplémentaire.» Il utilise l’Europe à des fins politiques et joue, avec son referendum, « à la roulette russe avec quatre balles dans le barillet. »

Reste des sujets d’espoir, comme la COP 21, auquel l’assureur est particulièrement attentif. Interrogé sur sa portée réelle, le PDG du groupe Axa tire un coup d chapeau à la diplomatie française qui est « parvenue à mettre d’accord 195 pays sur une feuille de route relativement exigeante ». Un succès « dont on peut collectivement être fier. C’et la France dans son meilleur. Un paradoxe criant au regard de notre incapacité à régler nos problèmes intérieurs ».

Et de dénoncer le sous-investissement, « au cœur du drame français », depuis une génération. Dans les circonstances actuelles, compte tenu des niveaux très bas des taux d’intérêt, des cours du pétrole et de l’euro, la croissance du Pib devrait être « le double de celle que nous avons ». Alors, quelles seraient, selon lui, les cinq mesures prioritaires à prendre pour pallier en finir avec ce « drame » ? Il faut, selon lui « envoyer des signaux forts et simple» : supprimer la garantie de l’Etat sur la dette de l’UNEDIC pour forcer les partenaires sociaux à revenir à l’équilibre ; inscrire l’obligation constitutionnelle d’un retour à l’équilibre du budget de l’Etat, sans augmenter les prélèvements, à horizon trois ans ; en matière de droit du travail, donner la primauté aux accords d’entreprises ; sur le plan fiscal, poser la règle que les prélèvements de toutes natures ne pourront pas excéder 50 % du revenu individuel ; investir massivement dans l’enseignement primaire  « à budget d’éducation nationale constant ».