1989-1998 Regards sans frontières

Publié le 9 janvier 2007

Texte issu de la brochure du cinquantenaire de l’AJEF.

La chute du Mur de Berlin en 1989 engage l’Europe dans une voie qu’elle n’avait pas prévue: après l’écroulement des régimes communistes à l’Est, le débat entre élargisse- ment et approfondissement est tranché par la nécessité politique d’intégrer à l’Europe démocratique ces nations avides de liberté.

Mais, en même temps, la marche vers la monnaie unique se poursuit avec le Traité de Maastricht, ratifié en France par le référendum de 1992, et le Marché unique entre officiellement en vigueur en 1993.

La convergence de ces deux séries d’événements dessine le nouveau visage de l’Union européenne : un grand marché, de plus en plus exigeant en matière d’ouverture à la concurrence, avec en son sein une zone monétaire intégrée, mais une absence criante de gouvernance politique, notamment dans le domaine économique. Les deux processus occupent la décennie : les négociations avec les pays candidats sont lancées en 1997 et aboutiront à l’intégration de dix nouveaux membres en 2004. Quant à la préparation de la monnaie unique, elle se traduit, en France, par quelques années de rigueur sous le signe de la “désinflation compétitive”, afin d’éviter un décrochage de la parité franc-deutschemark.

Cependant, l’inconstance du comportement électoral des Français produit des politiques économiques discontinues. La cohabitation de 1993- 1995 amène une nouvelle vague de privatisations et de déréglementation, ainsi qu’un début de réforme des retraites, mais après l’élection de Jacques Chirac à l’Elysée la volonté réformatrice se brise sur les grèves de l’automne 1995. Et la gauche, revenue au pouvoir en 1997, remet le cap sur le social (35 heures, CMU, emplois jeunes…).

Mais la presse observe aussi la montée multiforme de la mondialisa- tion : explosion et sophistication des marchés financiers, percée des pays émergents, prise de conscience de la menace climatique (sommets de Rio en 1992, de Kyoto en 1997), grandes négociations commerciales… Elle suit les avancées de la “financiarisation” et ses dérives : scandale du Crédit lyonnais en 1993, déconfiture de la banque Barings en 1995, crises financières asiatique et russe en 1997-98.

Elle se heurte à l’opacité croissante des entreprises: vigilantes sur leur image, discrètes sur leurs données “stratégiques”, celles-ci opposent à la recherche d’information des journa- listes leur propre politique de commu- nication. D’autre part, l’information économique est un domaine de plus en plus sensible, ce qui attise le conflit latent entre les prérogatives d’enquête des autorités boursières et la protection des sources.