1981-1988 La révolution financière

Publié le 9 janvier 2007

Texte issu de la brochure du cinquantenaire de l’AJEF

La gauche arrive au pouvoir en France au moment où l’économie mondiale entre dans une phase de libéralisation. Sans attendre, elle applique son programme : relance budgétaire, hausse du Smic, nationali- sations, 39 heures, retraite à 60 ans…

Mais l’ “illusion lyrique” dure peu. Dès la mi-1982, le franc se retrouve dévalué de 10 % par rapport au deutschemark, les prix flambent et la balance extérieure plonge. En mars 1983, il faut choisir : sortir du Système monétaire européen, comme le préco- nisent certains conseillers influents de Mitterrand – on les appellera les “visiteurs du soir” –, ou y rester, au prix d’une sévère cure d’austérité, comme le recommandent Pierre Mauroy à Matignon et Jacques Delors à Rivoli.

Finalement le président tranche pour l’Europe. Le plan de rigueur de Delors est l’un des plus draconiens que la France ait connu. L’assainissement porte ses fruits, mais la croissance ne repartira que dans le dernier tiers de la décennie, ce qui permettra à Michel Rocard de créer le RMI pour couvrir un risque que l’Etat providence n’avait pas prévu : la pauvreté.

Le virage économique ne s’arrête pas là. Dès 1984, Pierre Bérégovoy libéralise le système bancaire et le marché monétaire, et Edouard Balladur, ministre de l’Economie lors de la cohabitation de 1986-1988, accélère le mouvement en lançant les privati- sations.
La révolution financière est en marche, poussée par trois moteurs: la libération des mouvements de capitaux, la “désintermédiation” des financements (l’appel aux marchés se substitue au crédit bancaire), et l’in- formatisation des transactions.

La bourse de Londres est la première à accomplir son “Big bang” en généralisant la concurrence entre les opérateurs. Et en 1988, la presse salue la première OPA géante, celle du fonds d’investissement américain KKR sur le groupe agro-alimentaire RJR-Nabisco.

Cette vague de libéralisation a un prix, l’instabilité : crise financière mexicaine en 1982, krach boursier en octobre 1986, envolée et chute du dollar entre 1985 et 1987. Dans ce monde agité, l’Europe se consolide avec l’entrée en vigueur en 1986 de l’Acte unique qui achèvera, en quelques années, la construction du “grand marché”. A l’Est, la “perestroïka” de Mikhaïl Gorbatchev est comme l’aveu d’échec d’un régime proche de sa fin.

Dans la presse, l’économie s’impose de plus en plus comme un sujet majeur. De nombreux titres se créent. Le développement de l’actionnariat stimule l’information sur la bourse et les placements, et la clientèle des cadres reste un gisement de croissance de la diffusion.