1956-1957 Les rendez-vous de Rivoli

Publié le 9 janvier 2007

Texte issu de la brochure du cinquantenaire de l’AJEF.

Cette Quatrième République finissante laissera le souvenir d’une période morose et agitée : guerre d’Algérie, crise de Suez, grèves, instabilité ministérielle… Et pourtant, même si l’inflation reste un problème lancinant – elle est repartie à la suite des mesures sociales mises en œuvre par le gouvernement de Guy Mollet –, l’économie ne se porte pas si mal, avec une croissance qui avoisine les 5 % par an et un taux de chômage inférieur à 2 %.

Dans la presse, les grands sujets économiques du moment n’ont rien d’abstrait ni de théorique : la vie chère, les difficultés de logement, les revendi- cations sociales. Il n’y a que sept ans que les tickets de rationnement ont disparu. Pour aider les vieux, on invente en 1956 la vignette automobile – un impôt “provisoire” qui sera supprimé… en 2001.

Mais en même temps, la France est en plein redressement. Les deux premiers Plans (le deuxième s’achève en 1957) ont fixé comme priorité la croissance de la production – le logement ne viendra que plus tard. Les besoins d’infrastructures et d’équipement des ménages nourrissent une activité intense. Les Français travaillent près de 2100 heures par an (600 de plus qu’aujourd’hui).

La croissance se poursuit à l’abri des barrières douanières, dans une Europe protectionniste dont la signature du Traité de Rome annonce la fin. Un monde où l’équilibre de la terreur impose une stabilité que troublent, à l’Est, en 1956, le rapport Khrouchtchev et l’intervention russe à Budapest. L’année suivante, l’URSS lance le premier Spoutnik.

Dans une économie aussi dirigée (contrôle des prix et des changes), la principale source d’information se trouve au ministère des Finances. Chaque jour, une poignée de journalistes accrédités arpente les couloirs du Louvre (“Rivoli” restera le siège du ministère jusqu’en 1988) et se retrouve à midi pour un bref point de presse donné par le ministre ou son directeur de cabinet. On glane aussi des confi- dences en accrochant un conseiller entre deux portes, ou parfois en “passant la tête” dans un bureau pour un bavardage informel.

En juin 1956 – Paul Ramadier était alors le ministre des Finances du gouvernement Mollet, le vingtième depuis 1947 –, ce petit groupe crée l’Ajef. Autour d’Armand Macé (Le Parisien), qui en sera le premier président, et de Jacques Le Désert, René Mazedier, Rémy Dussart, il y a Jean Boissonnat (La Croix), Gilbert Mathieu (Le Monde), qui occuperont après Macé la présidence de l’association, et quelques autres. Les statuts seront modifiés en 1978, puis en 1986 pour s’adapter à l’augmentation du nombre des journalistes adhérents.