Les voeux du président de l’Ajef, Serge Marti, au ministre des Finances et des Comptes publics, Michel Sapin, et au secrétaire d’Etat chargé du Budget, Christian Eckert

Publié le 14 janvier 2016

Bercy, le jeudi 14 janvier 2016

Bonjour à tous,

Merci de participer à cette cérémonie des vœux à la presse organisée sous l’égide de M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics et de M. Christian Eckert, secrétaire d’Etat chargé du budget.

Bonjour Messieurs les ministres

Merci de me permettre, au nom de l’Association des Journalistes Economiques et Financiers, l’AJEF, et comme le veut la coutume depuis de nombreuses années, de dire quelques mots à l’attention de mes consœurs et confrères, que je remercie pour leur présence, mais aussi à vous, Messieurs les ministres, ainsi qu’à vos collaborateurs et à tous les personnels de Bercy.

Lorsque nous nous sommes retrouvés ici même, en janvier 2015, c’était au lendemain ou presque de la tragédie qui avait plongé la nation dans la stupeur, l’assassinat de journalistes, caricaturistes ou non et de leurs collègues de Charlie Hebdo, de policiers chargés de leur protection, d’autres citoyens français, croyants ou non, venus tout simplement faire leurs courses à l’Hyper Cacher.

Qui aurait pu penser qu’un an plus tard, il nous faudrait à nouveau, car comment faire autrement, évoquer une épouvantable réplique, celle des attentats du 13 novembre au Bataclan et aux terrasses de cafés qui ont plongé la France dans la sidération, nous conduisant à devoir admettre cette terrible réalité que, désormais, nous sommes TOUS concernés.

A cet égard, les professionnels de l’information continuent à payer un lourd tribut à cette juste cause, la défense, non négociable, de parler et de penser..

Au cours de l’année 2015, 110 journalistes ont été tués dans l’exercice de leur métier, contre 71 l’année précédente, auxquels s’ajoutent 54 professionnels encore retenus en otage dans le monde.

Terrible ironie, la tuerie de Charlie Hebdo a conduit la France à figurer cette année-là au troisième rang, après la Syrie et l’Irak, au triste record, numériquement parlant, des pays les plus « criminogènes » pour tous ceux qui font profession de préserver la liberté de penser et de s’exprimer librement

Ces atteintes aux libertés fondamentales ne se produisent pas que dans les zones de conflits qui, chaque jour, font l’actualité ou dans des pays dits autoritaires, comme en Chine où le gouvernement vient d’expulser notre consœur de L’Obs.

Elle nous affectent à présent sur notre sol, dans notre bonne Vieille Europe, sous des formes plus ou moins musclées. En Russie bien sûr mais aussi en Hongrie ou en Pologne où des gouvernements ultra-conservateurs ont commencé à mettre la presse et la justice au pas cadencé.

Il faut s’insurger, s’indigner, protester énergiquement contre ces atteintes à des principes démocratiques qui sont l’ADN de notre volonté farouche de vivre ensemble et dont on sait combien ils peuvent être fragilisés. Car, là aussi ; nous sommes TOUS concernés.

A ce stade, pour retrouver des motifs d’espoir et souffler un peu par rapport à ce qui précède,, il suffit de se rappeler que face aux situations délicates, dramatiques parfois, vous le savez bien, le poète a toujours raison ! Surtout quand il s’appelle Jacques Prévert, ce révolté, pétri d’humanité, ce dont nous avons bien besoin en ce moment et qui, de mémoire, disait :

 « Oui, je sais, un peu partout, tout le monde s’entretue. C’est pas très gai. Mais d’autres s’ENTREVIVENT. J’irai donc les retrouver ».

Alors, suivons son conseil, faisons en sorte de nous ENTREVIVRE et retrouvons-nous sur des sujets, sans doute moins tragiques mais aussi importants pour notre quotidien, à savoir, pour changer de registre, l’horizon économique, français mais aussi international, encore singulièrement encombré si l’on en croit les dernières estimations du FMI ou de la Banque Mondiale.

Lors de ses vœux à la Nation, le président de la République, a annoncé un autre Etat d’urgence, économique cette fois, avec le lancement de plusieurs chantiers ambitieux, indispensables, certes, au redressement du pays dans un contexte de croissance interne encore trop faible.

Mais qu’il faudra financer sans que l’on sache très bien comment faire pour dégager les quelques milliards d’euros supplémentaires destinés à financer la formation de 500 000 chômeurs, la prime à l’embauche pour les PME ou encore les grands travaux de la « croissance verte ».

 Le chef de l’Etat en dira certainement un peu plus le 18 janvier, notamment à propos de la lutte contre le chômage mais nous avons hâte de vous entendre dès à présent, Messieurs les Ministres, vous qui êtes les gardiens du budget et des finances publiques, y compris au regard des engagements européens de la France

 Pour l’heure, nous vous donnons rendez-vous, dès à présent, pour un événement peut être plus festif, à savoir le 60ème anniversaire de l’AJEF, l’Association des Journalistes Economiques et Financiers, que nous allons célébrer à l’automne prochain.

Durant toutes ces années, nous n’avons pas dévié de notre mission : aider nos adhérents à fournir à leurs publics la meilleure information possible, indépendante et de qualité.

D’où les ateliers que nous avons mis en place à Bercy et à l’OCDE, à destination des journalistes. Le prochain se tiendra d’ailleurs, ici même, le 19 janvier autour de Bruno Dalles, le directeur de TRACFIN sur la criminalité financière et le financement du terrorisme.

D’où également des activités dédiées cette fois au grand public, gratuites et ouvertes à tous, à savoir les Amphis de l’AJEF qui ont lieu en soirée au Lycée Louis le Grand et dont le cycle 2015-2016 se déroule autour d’un thème qui intéresse tous les Français : « Mythes et réalités du temps de travail et des nouveaux modes de son organisation ».

Des informations que vous retrouverez sur notre site internet Ajef.net que nous avons modernisé.

Enfin, à propos d’information de qualité et indépendante, les deux notions vont de pair, l’attention que nous accordons aux bonnes pratiques journalistiques mais aussi à celles qui seraient susceptibles de sérieusement les entraver.

C’est là le sens de l’action énergique que nous avons déployée depuis plusieurs mois pour faire obstacle à la volonté de certains parlementaires, français et européens, relayant les intentions peu louables de certains lobbies industriels, de ne pas exclure nommément les journalistes de la directive relative au « secret des affaires », inspirée du fameux « secret défense », avec les conséquences judiciaires et pénales que cela implique.

 Cette mobilisation de la profession a permis d’éviter le pire à en juger par le texte qui devrait être voté le 28 janvier par la Commission des Affaires Juridiques du Parlement Européen. Ce document qui devrait être définitivement adopté au printemps de cette année ne fait plus référence aux conditions de l’exercice « légitime de liberté d’information », conformément à notre exigence.

De plus, il offre une protection aux lanceurs d’alerte dont les actions ne seraient plus condamnables dès lors qu’elles « agissent dans le but de protéger l’intérêt public général ».

C’est sur cette note d’actualité réconfortante quant à l’efficacité de notre action collective que je conclurai mon propos.

En vous souhaitant, Messieurs les Ministres, ainsi qu’à vos proches, à tous les personnels de Bercy, y compris bien sûr nos amis du SIRCOM avec lesquels nous travaillons régulièrement, avec un mot particulier, vous le comprendrez, à l’adresse de mes consœurs et confrères journalistes que je remercie pour leur fidélité, en vous souhaitant donc une très très bonne année 2016, beaucoup, beaucoup plus douce que la précédente.

Merci à tous.

Serge Marti, président de l’AJEF